« Can’t Help Myself »?

Dans ce travail commandé pour le musée Guggenheim en 2017, les artistes Sun Yuan et Peng Yu utilisent un robot industriel, des capteurs de reconnaissance visuelle et des systèmes logiciels pour examiner notre réalité globale de plus en plus automatisée. Placé derrière des murs en acrylique transparent, leur robot est un bras programmé, et a une tâche spécifique. Typiquement, un bras articulé que l’on rencontre dans les usines d’assemblage de matériaux par exemple. Ici, le bras est programmé pour contenir un liquide visqueux et rouge foncé dans une zone prédéterminée. Lorsque les capteurs détectent que le fluide s’est trop éloigné, le bras le remet en place avec frénésie, laissant des taches sur le sol et des éclaboussures sur les murs environnants.

« Qui est le plus vulnérable : l’homme qui a construit la machine ou la machine qui est contrôlée par un homme ? »

questionne, Xiaoyu Weng (conservatrice dans le domaine de l’art contemporain) concernant la présentation de l’œuvre sur le site du Guggenheim.

La machine est une construction-programmation de l’humain, elle ne reflète que l’homme et sa technologie. Elle n’a pas de conscience, elle n’est pas vivante.

La machine est vulnérable si sa programmation l’est également.

La machine est vulnérable à l’obsolescence, car elle est liée aux progrès techniques de l’Humain.

Biais de cadrage (ou effet de cadrage « framing effect) et corrélation illusoire, donc… ?

« Qui est le plus vulnérable : l’homme qui a construit la machine ou la machine qui est contrôlée par un homme ? »

En psychologie, le cadrage est le fait de présenter un « cadre cognitif » comme étant adapté pour réfléchir sur un sujet. Or, la manière de présenter un problème ou un sujet n’est pas sans conséquence sur le raisonnement qui en découle.

Le biais de cadrage (ou effet de cadage) désigne l’influence importante que peut avoir la formulation d’une question ou d’un problème sur la réponse qui y est apportée. Il montre à quel point l’être humain est influençable et offre un moyen de le mesurer.

Ce phénomène a été démontré en 1981 par Daniel Kahneman (né en 1934), psychologue et économiste américano-israélien, prix Nobel d’économie en 2002. (Source définition : Toupie)

Certains vont jusqu’à comparer le « travail » de ce robot au mythe de Sisyphe (connu pour son châtiment, consistant à pousser une pierre au sommet d’une montagne, d’où elle finit toujours par retomber.). La comparaison n’est à mon sens, absolument pas pertinente dans ce contexte. D’un point de vue existentiel donc, cette machine fait un travail inutile et vain… alors qu’elle pourrait être astucieuse et donc astucieusement utilisée. Ce qui n’est visiblement pas le cas.

Mais, ce robot a été programmé par des Humains-artistes, non ? (CQFD). Et en l’occurrence, le robot n’exécute que ce que l’Humain lui demande. Ce robot est alors vulnérable seulement parce que l’Humain l’a rendu vulnérable.

La corrélation illusoire, ou corrélation trompeuse, est un biais cognitif qui consiste à percevoir une corrélation entre deux évènements, corrélation qui n’existe pas ou qui est bien plus faible en réalité. Ce phénomène de psychologie sociale a été mis en évidence en 1967 par deux psychologues américains, Chapman et Chapman.

Quant au choix du liquide visqueux rouge, ramassé et projeté sur le mur : provocation et connotation classique…

Question de droits ?

Il est donc très facile d’influencer et ainsi créer une confusion, en faisant croire que le robot est vulnérable, en laissant entendre que la machine est un être vivant… qui, extrapolons un peu, pourrait dès lors avoir des droits ? Je ne suis pas sûre que ce travail remette en question une certaine moralité, mais est à mon sens plutôt un travail irresponsable.

Rappelons que le 25 octobre 2017, le roi Salmane d’Arabie Saoudite a accordé la citoyenneté de son pays à « Sophia ». Une femme ? Pas exactement : plutôt un robot humanoïde. Sophia, gynoïde activée le 19 avril 2015 a plus de droits que les femmes de son pays ! Cruelle ironie…

Comme l’explique Ali Al-Ahmed, directeur de l’Institut des affaires du Golfe : 

« Beaucoup de femmes (saoudiennes) ont rencontré la mort simplement parce qu’elles ont tenté de quitter leur maison et Sophia se balade partout [sans tuteur masculin]. La loi saoudienne ne permet pas aux non-musulmans d’obtenir la citoyenneté. Est-ce que Sophia s’est convertie à l’Islam ? Quelle est la religion de cette Sophia et pourquoi ne porte-t-elle pas le hijab  ? Si elle demandait la citoyenneté en tant qu’être humain, elle ne la recevrait pas » !

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